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DIRE LE VIN
11 avril 2013

MISE EN SCENE DU TERROIR: EPISODE 3 CHABLIS ET LE RENOUVEAU THOMAS PICO

LE TERROIR COMME DENSITE CHEZ THOMAS PICO

 

 

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Thomas Pico est pour moi une révélation. Vins typiques de Chablis, mais sans rien de commun avec le reste de l’appellation ! Interrogation de la vision normale de ce terroir, associée à des arômes dits typiques, arômes qu’on retrouve d’une manière différente, radicale, aboutie, mûre chez Thomas Pico, de sorte que certains se retrouvent déstabilisés.

Alors, interroger une normalité à partir de ce qui la transcende, de ce qui la transfigure me semblait opportun. Aperçu du terroir comme densité qu’on accompagne, qu’on représente, accouchement du terroir contre fausse-couche.

- « Dans ta vinification, lorsque tu penses les choses en amont, est-ce que ton processus te paraît scientifique et formel ou est-ce que tu tâtonnes par essai et par erreur et qu’il y a quelque chose de technique, voire d’artistique dans l’idée que tu te fais de ta vinification.

- On va aller plus loin et reprendre les choses à la base et dans sa globalité ! Les vignes sont travaillées proprement, la vendange est manuelle et s’accompagne d’un tri poussé, des maturités poussées, le minimum d’intrant, un peu de soufre, pas toujours de filtrage. La vinification est l’accompagnement de ce qui est pensé en amont dans la viticulture. Dissociez les deux relèverait d’un non-sens! Levurez et faire des élevages courts avec un tel travail seraient ineptes.

- Oui, mais es-tu dans un processus que tu maîtrises ?

- Non, on ne maîtrise rien. Je le vois souvent sur les vinifications où je peux avoir du sucre,  où la fermentation est laborieuse. Mais à partir du moment où tu mets les vins un peu plus tard en bouteille parce que je pratique des élevages longs, on se laisse plus de marge de manœuvre. Il y a une démarche sereine qui confine au luxe, de sorte que je n’ai jamais eu de soucis.

- Ta première vinification, c’est 2006, quels sont ton meilleur et ton pire souvenir de viticulteur ?

Des pires, il y en a pas mal ! Les meilleurs souvenirs sont le retour de mes clients ! Ensuite, l’ambiance des vendanges.

- Sur le Chardonnay, la question du rendement a été, à mon sens, considérée par les anciennes générations comme une question subsidiaire, presque sans importance ; j’aimerais avoir ton avis là-dessus. Elle revient quelque peu avec la nouvelle génération. Question surfaite ou principe pour un bon vin ?

- C’est identique à presque tous les cépages.

- Sur le même plan que le pinot noir ?

- Comment veux-tu que le vin soit plus dense à 70 hectolitres de rendement qu’à 35 ! Cela est impossible.

- Si tu compenses par différents procédés techniques comme le sulfitage, etc. ?

- Non, il n’y a pas que ça ! Pour le vin, c’est une densité ! Pour moi, c’est aussi simple que ça, c’est une histoire de densité.

- On ne peut pas compenser une vendange médiocre par des procédés chimiques. Pour toi, ce n’est pas cohérent.

- Tu arrives toujours à masquer avec du collage, tu arriveras à maquiller aujourd’hui avec des procédés chimiques pour faire un vin commun, donc considéré comme représentatif de l’appellation. La question du vin, c’est peut-être et avant tout la question de sa commercialisation. Moi, j’ai la chance d’avoir des amateurs passionnés autour du domaine.  Je peux me permettre d’attendre les vins et de les mettre disponibilité quand je veux et pas quand je peux.

- Est-ce finalement le terroir ne commence pas dans le terre et ne termine pas dans la vinification ? J’aime la comparaison de la terre avec la matière première du sculpteur que tu sculpterais à partir des spécificités de l’année.

- Moi, mon principe, c’est de récolter mûr partout ! Je dévie un peu de ta question. La vinification est la même partout. Je n’ai pas plus de bois neuf sur un premier cru qu’un autre.

- Bon, vu que ta particularité, c’est une récolte mûre, cela suppose quand même que d’autres ne vendangent pas mûr ; bien plus, quand on boit tes vins, d’aucuns les trouvent trop mûrs et donc non représentatifs de l’appellation, cela m’interpelle !

- Tu te doutes bien que je ne suis pas là pour juger les autres.

- Je vais poser ma question autrement, tu es un des vignerons qui vendangent le plus tard, non ?

- A Courgis, là où sont mes vignes, on est obligé de vendanger tard. Mais j’y mets un point d’honneur et c’est une volonté personnelle, bien sûr. On parlait de terroir tout à l’heure, le but c’est que le terroir parle parce que je vendange quand le raisin est mûr et que mes vinifications sont similaires quel que soit le vin. Les différences sur le vin ne sont pas dues à l’élevage comme cela arrive parfois…et à ce moment-là, on parle de terroir pour maquiller des choix de vinification. Sur Montmains appelé aussi Butteaux cela ventile bien, sur Beauregard, on est en vallée fermée. Le terroir, ce n’est pas que la parcelle, c’est le territoire spatial.

- Qu’est-ce qu’un terroir pour toi ? Je te pose la question parce que le monde moderne se définit plutôt en termes de cépage plutôt qu’en termes de terroir.

- Les types de sol et d’exposition sont clairement différents sont Chablis. Je trouve dommage qu’on se définisse monolithiquement en termes de cépage. Sur Courgis, il y a des argiles blancs et on est sur la même latitude que Chavignol, si bien qu’on ferait des sauvignons exceptionnels. Je me battrais pour en planter parce qu’on aurait rien à envier aux meilleurs sancerres. Mais on n’est un peu menottés par l’appellation. C’est dommage. Pour reparler terroir, il y a clairement des sols et des vins différents. On le voit d’autant plus que tu es en monocépage. Un vigneron, c’est un assistant du terroir.

- Je sens que tu vas me dire que tu accouches le terroir !

- J’accompagne une démarche plus naturelle que technique.

- Ton critère de qualité est l’intervention minimale, mais plus importante sur les millésimes difficiles.

- Sur notre vignoble, il y a une telle concentration de vignes où les maladies sont concentrées que forcément, il faut agir en conséquence.

- Ton bouchon en cire, la reproduction d’œuvres plastiques sur tes étiquettes donnent une vraie dimension spécifique, artistique à tes bouteilles.

 

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 - Ces choix participent à ce qui a été fait avant ! C’est une continuité et une totalité. »

 

 

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